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C’était de poésie

C’était de poésie

 

C’était de poésie, de cet art du peu et de la fugue, de la langue piquée à ses endroits sensibles, de la mollesse du temps qui se ressaisit en quelques mots ou de sa rude lâcheté qui trouve toujours raison auprès des raisons d’à propos,

 

C’était de poésie que je croyais parler, de cette façon de ne pas esquiver ce qui meurt en soi chaque jour et qui rejoint le regret des temps irréparables, de cette lumière qui fond dans la main des vieillards et que l’enfant disperse sans compter en s’essuyant les yeux,

 

C’était de poésie que je voulais coudre l’horizon aux nuages et ne plus séparer le monde qui s’en va, je voulais tant vous rejoindre mes amis volatiles enlevés à la matière d’ici, vous dire que la joie est une affaire en soldes, que de tristes copies circulent sur le marché, que l’envie est majeure et la cupidité féroce, mais ça vous le savez déjà, alors vous dire que la peur arrive dans un chariot poussé par les plus pauvres, que les dieux s’y sont mis à nouveau à nous chercher des puces et que les édentés chantent en colère de terribles refrains,

 

C’était de poésie, de cette pose fréquente chez de fragiles esthètes, fâchés contre eux-mêmes comme uniques ennemis, c’était de poésie qui bat contre le roc et l’use sans appel, c’était de poésie que je voulais couvrir le moindre avec encore bien moins, mais les saccages, la volupté de mordre et l’élan vers le pire parfois me laissent voir que la page est blanche toujours et encore blanche, que le vent est passé emportant quelques vers dans le désert aride des enclos idéaux,

 

Alors de poésie, parfois, je me fais un manteau et passe mon chemin vers des hommes lointains.

 

                                                     *

 

La mer emporte nos châteaux si longs à accrocher au sable du présent, tire les hommes vers des plaines lointaines où ils se jettent dans un dernier galop, la mer qui passe devant le seuil des maisons les plus basses en chuchotant l’ordre des recommencements, la mer un jour nous abandonne pour consacrer la nuit où nous filons dans de faibles lueurs des suaires toujours neufs.

                                           

Sur quoi nous allons, une planche, une ombre, une vague, un amour ? Sur quoi poser ce temps qui se dénoue en nous en piquant nos genoux d’éclats si douloureux ? Sur quoi poser sa tête, une dune, un sein, un nuage surnuméraire tombé à point ? Sur quoi nous allons, une promesse trahie, une joie si rapide ? Sur quoi ?

                                     

Elle venait d’hier et marchait comme avant, d’un pas sans attention, la tête encore défaite d’un baiser à rallonges, elle ajustait son cœur aux accents du dehors et faisait bonne mine à l’automne qui vient, elle venait d’hier et prenait comme on flâne l’avenir par la main, et soudain, la journée est passée et les doigts se détachent du temps qui se promène libre sans détourner la tête.

 

Septembre- octobre 2012

Tag(s) : #TEXTES
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