Martine ROLAND, Des amours de soie, Academia, 2023, 156 p., 15 € / ePub : 10,99 €, ISBN : 978-2-8061-3623-7
Des amours de soie, le troisième roman en date de Martine Roland, confirme encore l’intérêt de l’autrice pour les sujets denses et mystérieux, voire hors normes en nous invitant à suivre les rencontres, les chocs psychologiques et surtout la violence des relations humaines. Dans ce roman, paru dans une nouvelle collection de livres noirs chez Academia, « Noirs desseins », l’auteure nous offre un thriller psychologique surprenant et aux échos les plus noirs.
Un thriller est toujours une affaire d’équilibre, même dans l’excès, et l’autrice a su l’élaborer, à partir d’une nouvelle « Milosz ou la loi de la tégénaire » (qui avait remporté le premier prix au concours inter-bibliothèque Ardennes (Fédération Wallonie-Bruxelles) et Grand Est (France) en 2017), publiée aux éditions Ker…
L’autrice, donc, a su donner à cette nouvelle devenue roman une dimension où l’introspection et la perversion se croisent et tissent sans cesse, à l’image même de cette araignée tégénaire, une machinerie de pièges et de rebonds où tout ce qui pourrait s’y accrocher y connaîtra le destin de la dévoration.
Le roman de Martine Roland déborde de l’histoire qu’elle se plaît à nous raconter et son sujet renvoie le lecteur aux grandes questions de notre temps : la violence relationnelle, l’amour, la lâcheté, l’obsession, le pardon, la reconstruction… C’est une romancière qui a le goût vif de la narration, le sens de la psychologie des personnages…On y voit ces hommes et ces femmes de fiction s’agiter, se débattre, s’épuiser, rebondir. L’autrice sait qu’un personnage est un ensemble d’inquiétudes et de mystères reliés souvent par des révélations inattendues. Martine Roland développe ces histoires d’amour, de trahison, de soumission, d’amitié,… qui prennent des accents, tantôt émotionnels, passionnels, sexuels.
Milosz Rafalik est un être possédé par une passion dévorante pour les araignées tégénaires. C’est un enfant muet, solitaire, incompris et secret à la personnalité trouble et difficile à cerner. La romancière poursuit ainsi les rapports limites de parents et d’enfants qu’elle avait déjà entamés précédemment. Elle met en scène ici un père bourreau violent et qui décède subitement. Dès lors, la mère, lâche, disparaît un beau matin et tout au long des pages on voit ce que va devenir cet enfant du désespoir. Il fera des rencontres exceptionnelles, fondamentales qui vont bouleverser sa vie. Dans son parcours tendu, il fera la rencontre d’un père d’adoption, Gus, puis celle d’un ami fidèle, Farouk, qui deviendra son premier amant, puis Sergio, le sculpteur…
Milosz se bat, Milosz essaie d’en sortir, il grimpe l’échelle sociale… Il entreprendra des études de biologie (il rêve de devenir un entomologiste réputé), il est spécialisé dans les arachnides…
Mais sans trop dévoiler la trame de ce roman tissé de mystères et de cauchemars fascinants, la question est, qui tire le fil, Milosz pourra-t-il se sauver ? Cette question renvoie le lecteur à un fondamental romanesque : y a-t-il possibilité d’un l’absolu du pardon et de l’amour qui sont, la plupart du temps, les deux faces d’une même médaille ?
Martine Roland ne manque ni d’imagination, ni de souffle narratif et son roman plonge dans des abysses captivants.
Daniel Simon
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