Dans le cadre d'un projet collectif entamé en 2014, le "Dictionnaire de la Mauvaise Humeur", une entrée aujourd'hui pour accompagner mes voeux (ou mes boeux, je n' sais plus...).
Quand je vois une vidéo politique récente réalisée par des élus où "ils" comparent un Ministre en fonction à AH (Heil), quel que soit ce Ministre, et que le responsable de cette cochonceté affirme qu'il n'y a pas de lien, mais que c'était pour .... blablabla et que l'autre montrant les cieux illuminés affirme qu'il n'était pas au courant du contenu, ça s'appelle du cynisme, de l'assassinat démocratique et mérite une sacrée déculottée. Veule, bête et poujadiste, quel programme!
Que celles et ceux qui penseraient une seconde que le Sieur Ministre ainsi brocardé le mérite parce que c'est un fasco-nazo machin devraient s'acheter une baïonnette d'occasion (on trouve dans les meilleures familles comme trophées de Guerres) et s'asseoir dessus tous les matins, pour voir la différence entre avec et sans. C'était une remarque de AH à, propos du Mahatma et de sa résistance aux Anglais. AH soulignait que, face à son Régime, Gandhi aurait dû s'asseoir sur des baïonnettes et non sur la rue, que ça ce serait passé foutrement autrement. On ose le croire...
La langue encore fait des subtiles différences entre "un poing SUR ta g..." et "un poing DANS ta g...". On sent tout de suite ce qui fait plus mal. Et dans un des deux cas, on a nommé subrepticement l'existence d'une FRONTIERE. Annuler ces différences c'est insensibiliser le rapport au réel (qui est en somme un tissu de signes représentables et communicables. L'irréel serait privé de ces signes)
Brocarder, oui, insulter, injurier, blasphémer, OUI mais qui est au Pouvoir? Qui insulte qui? A quoi sert le Fou en regard du Roi? Quel est le langage de la Fonction? Où sont les strates de la représentation? Qui joue à quoi? Comment avoir le beurre et l'argent du beurre?
Enfin, le langage, par les politiques, systématiquement, vidé de ses nuances, suivi par la GRANDE Presse, presque systématiquement dans l'enfilement des lieux communs et attendus, devient "un corps en trop" de l'humanité.
On ne peut constater que la LUTTE à MORT pour défaire le langage de ses perspectives, points d'appui, historicité et représentation du monde est en pleine accélération. Que les paresseux, veules et téteurs de modernité de pacotille osent dire que ça s'appelle la VIE de la langue sont des COLLABORATEURS de la réduction du monde, pour eux, TOUT EST DANS LE PRESENT (plus d'Histoire), la SEXUALISATION de la langue DOIT disparaître (le monde anglo-saxon gagne) et enfin les distinguos comme VOIR et REGARDER, ENTENDRE et ECOUTER (des milliers du genre) sont en train de glisser dans la salsa vernaculaire.
Pendant des années, j’ai résisté dans mes ateliers à cette affirmation niaise : « Mets tout au présent, c’est plus vivant ! » Il suffisait de raconter un extrait de L’Iliade, que j’improvisais avec TOUS les temps pour que je voie les têtes s’immobiliser et les êtres tendus vers l’écoute, revisitant LES tempos de l’histoire, comprenant intimement les aller-retour entre rétroviseur et pare-brise etc…
Mais non, on affirme à nos chers Mohamed, Micheline, Angelina et Jean-Michel qu’il faut TOUT mettre au présent : « Je me lève, je vais pisser, je vais au boulot, je termine mon job, je vais au Supermarché, je baise , je dors, je me relève etc..." Ad libitum, je meurs et non JE SUIS MORT.
Alors que la langue nous dit assez, depuis l'enfance au moins, que des expressions, des positions, des incarnations, des expériences essentielles passent par le langage cathartique. "Quand j'étais mort", "On fait comme si j'étais mort",...L'usage du passé est essentiel pour pénétrer dans ce que nous appelons le présent qui n'est souvent qu'une représentation d'un "déjà vécu, déjà vu, déjà entendu, déjà reçu, déjà rêvé, déjà dit...".
Le présent c'est le futur qui vient vers nous et que nous accueillons...(Heidegger) ou Walter Benjamin (Le Narrateur): "Il est imposible de communiquer, de transmettre une expérience sans raconter une histoire". Et quoiqu'il advienne, le narrateur met toujours son récit au passé (pas au temps passé mais dans la position du passé) pour créer le présent.
Mais tout ça complique le monde de "la réalité", semble-t-il. Alors, oui, "Allô quoi?", ne pas se prendre la tête et pas de souci sont devenus les antiennes du temps.
(Re)lire à ce propos LES IRRESPONSABLES d'Herman Broch .
http://www.liberation.fr/…/11/broch-accuse-de-deception_350…
...et dans un autre genre: " La mort et la vie sont au pouvoir de la langue. Quiconque l'aime en mangera les fruits." Proverbes 18:21
et bien sûr "Adieu au langage" de Jean-Luc Godart: http://cinema.jeuxactu.com/news-adieu-au-langage-la-bande-annonce-du-nouveau-godard-20833.html
WB: http://dormirajamais.org/narrateur/