Le texte bref?
Une façon de s'empêcher de parler une langue littéraire molle, de crisper le sujet pour qu'à la lecture le lecteur détende le ressort.
Par manque de goût aussi pour l'univers petit-bourgois et attendu de nombre de romans, de même que pour une certaine "poésie" où des truismes infinis se répètent dans une identique sémantique (faille, creux, aube, infini, chemin, ...)
"Faire bref" pour creuser l'ignorance de l'auteur, la mettre à jour dans la révélation de ce que le texte, comme une fusée, dévoile.
"Développe, développe..." nous disait-on à l'"âge formatif", puis, soudain, comme ça, dans l'"âge économique", "fais court", "abrège"...
Serait-ce que les deux temps sont inconciliables?
Je le pense.
Comme l'"âge amoureux" est inconciliable avec l'"âge algorithmique". Quoique.
Faire bref, donc pour passer à la production par la suite, faire bref, pour laisser le temps de la décomposition de toute chose s'emparer de ce bref et le faire germiner.
Le bref est un spore. Une poussière de champignon qui se développe sur terrain accueillant.
La mousse, elle, envahit, étouffe, c'est de la prose diluée aux convenances de toutes sortes, ce que Zola appelait le roman bourgeois.
Au théâtre, dans des styles différents, le bref c'est Vinaver et ses "morceaux", ses coupures, ses ellipses, ou Tchekhov, même dans ces longues pièces.
Il ne cesse de saisir la brièveté des émotions, des sentiments, les tornades qui passent en fouettant d'un coup.
Il s'attache à attraper des lucioles et à les révéler au spectateur/lecteur.