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Contre les mots: la phrase.

Hier soir encore et ce matin, et avant hier et depuis une vingtaine d'années probablement, depuis l'arrivée Internet peut-être, du fragment documentaire, de la baisse d'attention à celui qui est là, à ce glissement de dérision sur ce qui est dit, peu écouté, pas répondu, rarement entretenu, hier donc, à nouveau, comme vous le vivez régulièrement j'imagine, j'ai été confronté à une personne qui n'avait que des mots, encore des mots, mais pas de phrases à sa disposition.

 

Cette obsession de ne pas vouloir écouter la phrase tout entière et de ne saisir que des mots au vol (un mal politique qui explique aussi la disparition de la plupart des émissions télévisées où les "débats" étaient de dérisoires et veules invectives), de réagir à l'instant à n'importe quoi en disant n'importe quoi, sans aucune attention au temps et à l'histoire de la phrase ou des phrases, sans prêter garde à la moindre cohérence, mais en répondant à l'instant par des mots dispersés, jetés en vrac à votre attention, avec le ton émotionnel qui convient, sans tenir compte aucunement de la moindre responsabilité que devrait contenir cette "réponse", voilà un des états de la langue aujourd'hui.

 

Plus besoin même de feindre, de tricher, d'argumenter, mais simplement de réagir, sinon c'est le silence glacial de l'ignorance, de la mauvais foi, du mépris de ce que les croyants appellent encore un échange...

 

Les mots, toujours les mots, jusque dans les discours collatéraux de la littérature ou de l'écriture (ateliers, coachings,...), rien que les mots: sentiers de mots, danse avec les mots, joue avec les mots, jongle, taille, arrose les mots...

 

Comme si les mots étaient le dernier bastion, le refuge sans danger, l'objet anesthésié, le feng shui du langage,...

 

La phrase engage, organise, place les mots là où on décide qu'ils feront sens et parfois forme, la phrase est une stratégie, même simpliste, mais en tout cas la mise en place d'un dispositif qui souvent ressemble à un Cheval de Troie tant elle est chargée de ses contradictions, réserves, excès, agglomérats d'inconscient (ou d'insonscient comme l'écrit J.P. Verheggen).

 

Priver la phrase de ces intentions, ou renoncer à en découdre avec celles-ci, c'est comme une exposition de bijoux en toc. Tout le monde sait que ça ne tiendra pas longtemps mais c'est fait "pour un moment"...Rien qu'un moment.

 

Des phrases, en forme d'antidote à la "mise en mot", qui n'est jamais loin de la mise en mort...

Tag(s) : #Articles
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