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Nous sommes ce dont nous nous souvenons.

Georges Steiner

 

Tu ne savais plus

ni d'ici ni de là ou de quand

tu ne savais plus

ce que tu disais savoir depuis

tellement longtemps le temps

ne compte plus la durée la lenteur 

un savoir à refaire 

tu ne savais plus

ce n'était pas le temps

de se souvenir de courir

derrière soi derrière

cette ignorance en toi

de lui tordre le cou

ignorance nouvelle appréciée

égale pour les pauvres 

d'esprit de corps de mémoire

esclaves de la disparition

et toi en ce temps précieux

qui reste au demeurant

incertain infini un laps

une apnée de l'enfance

aux étoiles éteintes

tu te souviens

dans la brume commune

de petits cris de rauques

de paroles flottantes

de phrases sans raison

tu te souviens ici

des anges électriques

des Marylin de banlieue

des héros de bistrot

de ce qu'il n'est pas utile

de se souvenir de rien

pas nécessaire ni précieux

la vie des hommes la lutte

la brume de plus en plus épaisse

enfants perdus jeunes tueurs

racoleurs de malheurs

tu te souviens ici

de peu de chose en somme

tu te souviens

de la brume et des étoiles

en soldes.

 

 

 

http://www.telerama.fr/idees/george-steiner-l-europe-est-en-train-de-sacrifier-ses-jeunes,75871.php

La barbarie de l'ignorance (Georges Steiner, Antoine Spire) - A voix Nue, Janvier 1997 - France Culture https://www.youtube.com/watch?v=-fUjHGN9biM

 

Tu ne savais plus
Tag(s) : #Textes
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