On se réveille la nuit, on se lève, on regarde le ciel par-dessus la brume, on se promet des choses que l'on ne tiendra pas mais qui font comme un baume qu'on repasse aux moments les plus secs.
Souvent ça fait comme lorsqu'on rate un train, on attend avec du temps en trop, on chipote, on se recoud le coeur, on calfeutre son âme, cette barque qui pèse tant et tant et ne mène nulle part, on se dit que la ligne sera dépassée bientôt, on l'aperçoit enfin cette frontière vers laquelle on menait ses chariots et ses maigres troupeaux, on est prêts, c'est un beau jour et c'est un bel endroit.
Le charroi se remet en route, les essieux crient, les ombres se pelotonnent dans les arbres gelés, le temps sautille dans la poêle, crépite, salit le carrelage, on passe le balai sur le sol encombré de résidus anciens, la lune se rassemble dans de vagues lueurs, on ouvre un livre en son milieu, jusqu'au matin parfois.
Le puzzle est à nouveau complet, les choses ont retrouvé leur place, des nuées passent encore dans le ciel vaguement mais déjà c'est le temps des ruades et des encombrements. Le jour va se lever.