Jean-Pierre GRIEZ, L’héritage assassin, Cerisier, coll. « Faits et gestes », 2024, 312 p., 24 €, ISBN : 978-2-87267-249-3
Avec ce nouveau roman, L’héritage assassin, Jean-Pierre Griez signe une enquête à propos des ombres, des falsifications et des difficultés de mémoire du génocide des Tutsis en 1994 au Rwanda. L’auteur, qui vit actuellement dans le Hainaut, a déjà publié plusieurs romans chez le même éditeur et est aussi réalisateur d’un film d’animation en 2020 sur l’Histoire de la République démocratique du Congo Caoutchouc rouge, rouge coltan.
Cela fait trente ans aujourd’hui que cette catastrophe absolue a eu lieu en un temps record, cent jours pour huit cent mille à un million de victimes. Ce chaos n’est pas surgi soudainement dans l’histoire rwandaise, nous le savons. Nous avons vite appris à quel point des pays occidentaux, comme la France et la Belgique, ont été impliqués, de façon confuse et complice, dans ce génocide qui fut comme l’aboutissement de plusieurs décennies de guerres et de massacres des Tutsis par les extrémistes Hutus. Depuis 1950, plusieurs massacres eurent déjà lieu…
Il est important de rappeler également la signification de ces mots « Hutu, Tutsi, Twa » qui, longtemps, ont été considérés dans la société rwandaise, avant l’arrivée des colons allemands puis belges, comme des classes sociales et professionnelles. C’est le régime colonial belge et l’Église catholique qui ont transformé ces fonctions sociales en « ethnies ».
À travers divers personnages, agissant ici en Belgique ou là-bas, jusqu’au au Congo, Jean-Pierre Griez nous fait parcourir une sorte de remontée dans le temps à travers la vie d’Aimé Letor et ses relations difficiles avec un père qui vécut cette époque. Quelles furent les implications de ce père ? « Ibanga » (le secret), encore…
Des secrets, il y en aura beaucoup d’autres, tus ou cachés, ou soigneusement étouffés, qu’Aimé tirera de ses souvenirs enfouis et de témoignages révélateurs.
L’auteur construit son enquête comme une remémoration des expériences tragiques, mais aussi en cherchant à comprendre, comment et en quoi, les intrications des responsabilités ont permis peu à peu cette absolue tragédie.
Depuis trente ans, nombre de documents et témoignages individuels ou politiques ont permis de mieux comprendre cette résurgence de l’horreur qui couve encore et encore en notre humanité. Une livre complexe et salutaire !
Daniel Simon