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Le livre d’Yves Namur, préfacé brillamment et savamment par Francis Edeline aux Editions de la Lettre volée, est la trace d’une longue histoire qui était déjà dans un pays éloigné, comme l’écrivait Racine.

 

Il s’agit ici de celui de l’expérimentation que faisait un jeune poète alors dans la plus totale discrétion,  il cherchait, s’amusait sur sa machine à écrire électrique et marguerites de 1984.O.

 

Et que voit-on quand on ouvre le livre ? La graphie d’un œuf, un œuf posé au-dessus ou en dessous d’une ligne, comme une ligne d’horizon, une mer, une mère, propre aux variations graphiques et glossolalies lettristes…

 

Pour celles ou ceux qui s’émerveillent à suivre les questions d’origine et le lieu du néant où nous nous retrouverons tous, le livre d’Yves Namur est une matière magnifique pour penser et voyager littéralement sur les intrication entre le sens et l’essence de la mer et de la mère. Il s’agit d’un voyage dans la distance, la disparition et la réapparition de cet œuf des origines…Nous sommes devant un objet ludique qui prend peu à peu, dans ses formes et variations subtiles, la dimension d’une sorte de mantra silencieux.

 

Dans ce livre, deux étages, dirons-nous : l’étage supérieur où se déploie la pérégrination des lettres de l’œuf plus ou moins dans la tension ou l’éloignement de cette ligne d’horizon qui rend possible la forme de ces calligraphismes ( la mise en page a été réalisée par la graphiste Joëlle Salmon, pour l’occasion de l’édition) et, dans l’autre partie, dans le bas de la page , des textes, matière à glossolalies. La lecture, presque chamanique de l’alphabet de l’oeuf et des récits qu’il convoque, suscite chez le lecteur une intimité heureuse avec ce sacré objet des recommencements.

 

Yves Namur a attendu longtemps, près de 40 ans…) avant de penser que son texte pourrait peut-être être publié, il y avait même renoncé mais heureusement l’écrivain Véronique Bergen et le poète et éditeur Pierre-Yves Soucy sont revenus déterrer ce bijou et ont sollicité l’auteur dans le sens de cette édition. Elle offre, du travail du poète et de ses pérégrinations méditatives, un écho de l’organisation secrète qui nous habite lorsque nous lisons et écrivons : quelle est cette voix que nous entendons au fond de nous ? Ce serait celle de l’origine paraît-il, celle du moment où nous labialisions encore. Le poète, à l’ouïe fine, peut probablement, à chaque fois, dans chaque vers, entendre le jouir de cet ouïr premier et nourrir la scansion muette que le poème suscite pour se frayer un chemin du corps à l’œil et à l’oreille des autres.

 

 

Daniel Simon

 

Yves NAMURO, l’œuf, préface de Francis Édeline, La Lettre volée, 2022, coll. « Poiesis », 2023, 143 p., 20 €, ISBN 978-2-87317-605-1

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Yves_Namur

 

 

 

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