Ephémérides du Confinement/4
Dans son livre, Suite à l'hôtel Crystal (Seuil, 2004), Olivier Rolin installe, dans de multiples chambres d'hôtels à travers le monde, des intrigues insolites, extravagantes, qui donnent à son livre des airs de biographie péréquienne . Le narrateur mesure très précisément chaque chambre, la décrit minutieusement, scrute chaque détail, ce qui renvoie soudain ces lieux à une banalité de l'ordinaire dans laquelle nous vivons le temps le plus long de notre vie.
Cette scrutation de chaque indice des lieux donne à ce semblant de confinement narratif des dimensions d'anamorphose, de distorsion, véritables accélérateurs de fiction.
Le confinement est un temps à la mesure de Perec et depuis Un homme qui dort jusqu'à Espèces d'espaces, les lieux, dans leur étirement, leur immobilité apparente, nous renvoient à une forme de suspens qui est le contraire de la solitude.
Mesurer son espace, pied à pied, en rêver les usages multiples, les contrarier, y installer des lieux narratifs, des sortes de niches frictionnelles, les loci, chers aux avocats romains qui, pour mémoriser des discours de plusieurs heures, avaient mentalement logés dans les arcades et espaces du Sénat les parties successives de leur discours, en premier lieu, en deuxième lieu, etc...
Le confinement, serait aussi le temps de la mesure et de la démesure emboîtées..
Georges Perec "Tentative d'épuisement d'un lieu parisien". http://escarbille.free.fr/vme/?txt=telp