La nuit tombe et déjà on n'aperçoit plus dans le brouillard que quelques fenêtres éclairées. Je guette le sentier de cendres qui mène aux maisons, une sorte de fer à cheval qui relie ces nouvelles constructions de francophones dans la Flandre des environs de Bruxelles.
Les voisins y déversent la cendre noire et grise des poêles à charbon. Par temps de pluie, une eau noire inonde les trous du chemin.
Jy ai bu cette eau sale un.jour à quatre pattes, et bien sûr, une sévère infection s'en suivit. Des piqûres de pénicilline quotidiennes dans les fesses pendant un temps si long firent que je me mis à lire furieusement.
Ce soir là, Saint Nicolas est arrivé devant chez nous accompagné du Père Fouettard et suivi de l'âne aux hottes pleines.
Je l'ai approché timidement et me suis senti transporté à l'instant dans un univers inquiétant.
Tout était suspendu, magique, amorti par le silence et le brouillard. J'étais seul et littéralement figé dans cette rencontre fabuleuse.
J'ai balbutie quelques mots, me suis approché en tremblant, Fouettard était effrayant et Saint Nicolas tellement impressionnant...J'ai reçu alors mon lot de mandarines et de bonbons...Il m'a tendu un paquet et j'ai hésité avant de le toucher.
En retenant ma respiration, je l'ai saisi à deux mains et me suis enfui après avoir prononcé des mercis presqu'inaudibles. J'avais si.peur, cette émotion me ramenait lentement au monde.
Quand j'ai déballé mon cadeau, j'étais encore là où je ne suis plus allé que rarement depuis.
Enfin, j'ai relevé la tête pendant que l'âne disparaissait dans le brouillard. ...